martedì 1 luglio 2014

Le wei­-qi, un jeu de gentils hommes

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La finesse stratégique du go

 





Silence autour des joueurs.

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La Chine possède deux sortes de jeux d'échecs. ( le wei-qi (围棋) ne peut pas évidemment  être comparée au jeu d'échecs NdR ) Le premier, le siang-tchi (象棋), qui ressemble beaucoup aux "échecs" occidentaux. Le second, le wei­-tchi (圍棋), connu en Occident sous le nom de "go", selon la prononciation ja­ponaise du caractère wei, est considéré comme l'un des joyaux de la civilisation chinoise, puisque le premier n'est, après tout, que le jeu venu de la Perse antique, et sinisé.
On joue au wei-tchi (go) à deux sur un échiquier. (La terminologie continue d'être inexacte. mais en dépit de ce  malheureux défaut le script donne des informations intéressantes NdR ) Mais là, s'arrête la compa­raison avec le jeu d'échecs, chinois ou oc­cidental. On le voit au premier coup d'oeil sur les pions: il y en a trois cent soixante, blancs et noirs, tous semblables. Comme tout Chinois le sait, jouer au go est un défi intellectuel, et c'est aussi un art que l'on peut observer dans le comportement de tout joueur et dans la stratégie déployée lors d'une partie. Avant de commencer, on s'assure que le matériel est propre et complet, puis les joueurs se saluent et prennent place. A la fin de la partie, en rangeant les pièces, les joueurs en vérifient le nombre et ré­pètent leur cérémonial du début.

Le jeu de go se compose d'un échi­quier et de cent quatre-vingts pions blancs et cent quatre-vingts noirs. Ces pions (ou pierre) sont en matière di­verse, depuis l'ivoire ou l'ébène jus­qu'aux matériaux modernes meilleurs marchés. A l'origine, ils étaient de co­quillage et d'ardoise. Ces pierres (en chi­nois, cheu), ont une forme constante: de 2,2 cm de diamètre et d'environ un centimètre d'épaisseur, et d'un poids de six grammes. L'échiquier (ou go-ban), est un plateau de quarante-cinq centi­mètres sur quarante-deux quadrillé de dix-neuf lignes horizontales et verticales, ce qui donne 361 intersections sur les­ quelles les pierres seront placées au cours de la partie. Certains points straté­giques, dénommés "points étoile", au nombre de neuf sont marqués sur le go-ban et aident le joueur à juger la position.

Hormis dans quelques tournois spé­ciaux, chaque partie se joue à deux. Un coup consiste à placer une pierre sur une intersection. Elle n'en bougera plus. Il s'agit donc de disposer les pierres l'une à côté de l'autre pour former un territoire le plus grand possible tout en empêchant l'adversaire d'en faire autant. Le vain­queur est celui qui a formé le terrain le plus important sur le go-ban.

Comme celles du jeu de dames, les pièces du go sont toutes identiques. Seule leur position sur le go-ban crée des différences, certaines ayant une grosse importance stratégique, d'autres deve­nant inutiles, ou même "mauvaises". L'importance de la pierre dépend unique­ment du joueur qui l'a placée. Une mau­vaise position peut amener à toute une série de faux mouvements ou de coups défensifs. C'est pourquoi le joueur doit peser toutes les conséquences possibles de son coup avant de disposer sa pierre sur le go-ban.

En Chine antique, le go s'appelait yi (奕), ou tchi (ki) qui peut s'écrire de deux façons (棊ou 碁) qui sont l'ancienne forme de tchi (棋) employé maintenant dans le mot wei-tchi. On remarquera dans la première forme écrite le bois (木mou). et dans la seconde la pierre (石cheu). Quant au caractère yi, sa partie inférieure représente les mains droite et gauche, c'est-à-dire en fait les deux joueurs.

Qui a inventé le go et à quelle époque? Po Wou-tcheu (博物志), sous les Tsin (晉,265-420), rapporte que c'est l'empereur Yao pour distraire son fils Tan-tchou. Bien que cette assertion soit réfutée par les historiens, elle est tout à fait plausible comme repère historique pour indiquer que le go a une histoire de plus de deux mille ans.

Le terme wei-tchi (go) apparaît pour la première fois dans le Tso Tchouan (左傳), un ouvrage sur les Annales des Prin­temps et Automnes de Tso Tsieou-ming, sous les Tcheou (1121-256 av. J.-C.), lequel ouvrage note « ... les joueurs de wei-tchi (go) semblent incapable de décider un coup ... » Cela se passait en 548 av. J.-C., la trente-quatrième année de l'empereur Ling, pendant la période des Printemps et Automnes, soit trente année avant que Confucius ne commence son aposto­lat. Plus tard, Mencius en fait état à propos de l'histoire de Yi Tsieou (奕秋) qui enseignait l'art du go. Mencius com­pare la participation à ce jeu à l'applica­tion dans les études.

Dans le Si-tching Tsa-tchi (西京雜記) de Wou Tchouen, sous les Léang (464-569), un ouvrage concernant les pé­riodes antérieure et postérieure à l'empe­reur Wou-ti des Han, on trouve ceci: «Tou Ling (杜陵) était un joueur de go hors pair. Une fois, on le railla pour avoir passé plusieurs jours devant le go-ban. Il répliqua par ces mots: "Une bonne maîtrise du go est profitable au confucianiste".»

Sous les Han postérieurs, Ma Jong (馬融, 79-166), mandarin et magistrat de la préfecture de Nan-tchouen sous Houan-ti (146-167) puis conseiller impé­rial, décrit la stratégie du go: "Au début, il faut occuper les quatre coins. A l'occasion, on peut laisser quelque espace et se porter au centre du go-ban. Une intense réflexion est nécessaire pour prévoir la situation pour les derniers coups. De cette façon, on peut gagner. "

Pan Kou (班固) qui acheva l' Histoire de la dynastie Han, commencée par son père, écrivit aussi un passage sur le go, sous le titre Yi-tcheu (奕旨, Guide pour le go). Il y présente son opinion sur la forme du go-ban et des pierres. Pour les Anciens Chinois, le ciel était rond et la terre carrée. Le go-ban est donc le sym­bole de la terre. Comme les dieux sont dans le ciel, les lignes droites, horizon­tales et verticales, représentent leurs acti­vités sur terre. Enfin, les pierres repré­sentent les "dix mille êtres" de l'univers répartis entre les deux principes mâle (陽 yang) et femelle (陰 yin).

A en juger par cette interprétation, les lettrés des Han postérieurs se divisè­rent sur la nature du go et de ses éléments. Décrivant les règles et les prin­cipes du jeu, Ma Jong avertit les joueurs de ne pas être pressés et gourmands. Il compara l'art du go à l'art de la guerre. Quant à Pan Kou, il établit la signification symbolique des pièces du go dans la cos­mologie de cette époque.

Bien que Pan Kou ait fait le détail des diverses significations du go, il ne s'est pas embarrassé d'y indiquer le nombre de lignes. Mais selon d'autres sources, il semble qu'à cette époque, le go-ban était divisé de dix-sept lignes, ho­rizontales et verticales. Sous les Tang, il y en avait dix-huit. Le go-ban de dix-neuf lignes est entré en usage sous les Song (960-1279) pour ne plus changer. Les chroniques identifient les caractéristiques du go-ban propres à chaque époque, ce que les jeux mis au jour depuis ont confirmés.

Un jeu de go en pierre des Han posté­rieurs, découvert à Wangtou dans le Hopei, était un carré de quatorze centi­mètres comportant dix-sept lignes, hori­zontales et verticales. Un autre en porce­laine, découvert à Anyang dans le Honan, avait quatre centimètres de long sur 1,2 cm de large avec dix-neuf lignes. Le nombre des lignes sur un go-ban en bois des Tang découvert dans le Sinkiang (Turkestan chinois) était aussi de dix­ neuf.

Sous les Han (206 av. J .-C.-220 ap. J .-c.), le go était aussi populaire chez les hommes que chez les femmes. Cepen­dant Tchia Yi (賈誼, 200-168 av. J.-C.), écrivain et historien, pensait que le go "manquait à la bienséance élémentaire" et déclarait qu "il devrait être banni puis­ qu'il était une inconvenance."

Tchi, la concubine de l'empereur Kao-ti (206-195) des Han cherchait dans le go un moyen de divination. Sa ser­vante Tchia Pei-lang révéla plus tard: «Quand j'étais au palais, tous les 4 du hui­tième mois, elle [Tchi] se rendait dans un bosquet de bambous pour y jouer au go. Le vainqueur était supposé avoir de la chance pour toute l'année tandis que la maladie s'a­charnerait sur le perdant. Toutefois, si le perdant tenait en mains une longue pièce de soie et priait à genoux la Grande Ourse, il pourrait être épargné.»

Tsao Tsao (曹操, 155-220), père de Tsao Pi, fondateur de la dynastie Wei (220-265), chef militaire et poète, fut un grand maître de go, Fong Yi-chan (馮翊山), Wang Kiou-tchen (王九真) et Kouo Kai (郭凱) étant ses adversaires régu­liers. On raconte que Kong Jong (孔融, 153-208), premier ministre de Peihaï sous Hien-ti (189-220), avait été dans son enfance un excellent joueur de go. Lorsque Tsao Tsao envoya ses hommes pour exécuter Kong Jong, son fils de neuf ans et sa fille de sept ans jouaient au go. On leur conseilla alors de s'enfuir, mais ils se retirèrent avec beaucoup de dignité: «Quand le nid est encerclé, plus aucun oeuf n’y échappera.» Ils furent tous exécutés plus tard.

Dans le San-kouo Yen-yi (三國演義, le Roman des Trois Royaumes) de Lo Kouan-tchong, un des grands romans classiques, on peut lire l'histoire sui­ vante: «Alors que Kouan Yu (關羽, géné­ral de la période des Trois Royaumes, mort en 219, et plus tard déifié comme dieu de la Guerre) jouait au go avec Ma Léang, Houa To (華陀, un médecin resté légendaire ) grattait avec un couteau l'os du bras de Kouan Yu qui venait d'être blessé par une flêche empoisonnée. Ce der­nier restait calme et gai alors que tout autour, sous une tente de campagne, les spectateurs se mordaient les lèvres.»
Le plaisir d'ordonner et de combattre.
Une histoire de Sié An (謝安, 320-385) est devenue un conte favori. Lorsque Fou Kien (符堅), à la tête d'une grande armée, arriva sur les bords de la Fei, tous les habitants de Kienkang (l’actuelle Nankin), la capitale, furent pris de panique. L'empereur Hiao-wou-ti (372-396) nomma Sié An à la tête des troupes impériales, avec la mission de ré­duire les troupes de Fou Kien. Sié An or­donna alors à son neveu, Sié Hiuan (謝玄, 343-388), de livrer bataille. S'inquiétant de la stratégie à définir, Sié Hiuan s'en­quit auprès de son oncle qui, occupé à une partie de go, lui répondit avec désin­ volture: «Ne vous en inquiétez point!» Plus tard, lorsque la nouvelle de la vic­toire de Sié Hiuan parvint à Sié An, celui­-ci était toujours en train de disputer cal­mement sa partie.

Voici une autre histoire datant des Wei du Nord (386-534). Un jour que l'empereur Cheu-tseu jouait au go avec Liou Chou, Kou Pi (古弼), un ministre, arriva pour présenter un document. Mais comme l'empereur était tout absorbé par à sa partie, Liou Chou ne lui annonça pas l'arrivée du ministre. Ce dernier, fu­rieux, s'approcha de Liou Chou, le frappa d'un grand coup et lui hurla: « Vous serez responsable de la mauvaise ad­ministration de l'empire!» L'empereur em­barrassé répondit: «Je vous en prie, je vous écoute.»

Sous les dynasties du Sud (南朝, 420-589), le go était devenu très popu­laire. Comme les divers souverains en­ çourageaient sa propagation, de grands maîtres du go apparurent, tels Wang Kang, Tchou Sseu-tchouang, Hia Tcheu­ song ou Yang Houan-pao. Une fois, Wang Kang misa une ville avec l'empe­reur Wen-ti. Et après sa victoire, il devint magistrat de la ville de Hiuan. Les relations diffèrent selon les Annales des Song (宋書, Song Chou) ou l'Histoire du Sud (南史, Nan Cheu). Pendant cette pé­riode de l'histoire de la Chine, les joueurs de go étaient classés selon leur aptitude en neuf catégories (品  pin): chen­-jou (神入), tso-tchao (坐照), tchu-ti (具體), tong-yeou (通幽), yong-tchè (用智), siao­-tchiao (小巧), teou-li (鬥力), jo-yu (若愚) et cheou-tcho (守拙).

Les empereurs des dynasties du Sud, Ming-ti (465-472) des Liou-Song, Kao-ti (479-482) et Ming-ti (494-498) des Tsi et Wou-ti (502-542) des Léang furent tous de remarquables joueurs de go.

Sous les Tang (618-907), on donna le titre de tchi-taï-tchao (棋待詔) à l'offi­cier qui accompagnait le souverain pour seulement jouer au go. Le premier tchi­ taï-tchao fut Kia Hiuan (賈玄), choisi par l'empereur Taï-tsong (762-779).

Avant de monter sur le trône, Hiuan­ tsong (846-859) jouait déjà souvent avec des moines japonais. Bien qu'il ne fût guère considéré comme un bon joueur, il perdait rarement une partie, car sa con­cubine Yang Yu-houan (楊玉環), arrivait au bon moment pour reprendre la partie et la gagner. Sur une peinture, L'empereur jouant au go (明 皇會棋圖), de la collection du Musée national du Palais de Taïpei, on peut voir Kao-tsong (règne Kien-long, 1736-1796) des Tsing, écrire deux quatrains, mais aucune pré­sence féminine n'est là pour terminer la partie!

Taï-tsong (976-997) des Song, nomma cinq mandarins pour jouer au go avec lui, Pan Chen-chiou, Song Paï, Chiu Chiuan, Wang Yu-tcheng et Tchia Chiuan. Pan Chen-chiou notamment avait les bonnes grâces de son souverain.

Sous Chen-tsong (997-1022), Wang An-che (王安石, 1021-1086), premier ministre, était un joueur invétéré malgré ses nombreuses défaites. II fut même surnommé le "perdant du go-ban". Voyant la partie perdue, il annonçait in­variablement à son adversaire: «J'aurais cru que cette partie m'aurait fait oublier mes ennuis et mes soucis. Au lieu de cela, elle m'a rendu encore plus anxieux.» Autre­ment dit, il demandait de cesser la partie avant la débâcle finale.

Un jour, l'empereur Khouchala (ou Ming-tsong, 1329-1329) de la dynastie mongole (Yuan), jouait avec un mi­nistre, Yu Tsi (虞集), et lui demanda: «On dit qu'un souverain ne doit pas se livrer à cejeu. Est-ce vrai?» Yu Tsi répondit: «Il doit bien y avoir une raison pour que les sages aient inventé le go. Confucius n'a-t-il pas dit que celui qui était versé dans cet art devait être considéré comme plein de sagesse et de compétence... En outre, on peut appliquer les stratégies offensives et défensives du go à l'administration d'un pays et à la guerre. Ainsi il faut encourager ce jeu parmi le peuple pour développer sa vigilance en temps de paix.»

La plupart des hôtes de Yu Tsi étaient des joueurs de go. Une fois, on vint l'embarrasser: «N'est-ce pas l'empe­reur Yao qui inventa le go? Tout le monde sait que ses deux fils étaient des bons à rien. Alors, pourquoi leur père leur a-t-il enseigné le go plutôt que le sens de la justice et de la vertu?» Yu Tsi ne se démonta pas: «Le jeu de go est un symbole du ciel rond et de la terre carrée, du principe yin (陰,féminin) passif et yang (陽, masculin) actif, de la ré­partition des étoiles, des mutations du monde, du pouvoir absolu de vie et de mort et de la puissance d'un pays. Les principes du go comprennent encore les vicissitudes de la vie de l'homme. Seul le sage est capable de bien tenir en mains une situation, aussi compliquée soit-elle, de protéger autrui avec bienveillance, d'agir avec justice, d'organiser avec courtoisie et de comprendre avec bon sens. Il ne faut pas prendre le go comme un simple passe-temps.»

Tout près de Nankin, se trouve le lac Mo-tcheou (莫愁) qui doit son nom, dit-on, à une jeune fille vivant sous les Six Dynasties (六朝,220-589). Sur ses berges se trouve le temple de Houa-yen, avec son pavillon Cheng-tchi (勝棋, "Vic­toire au go ''). Une fois, Taï-tsou (1368-1398) des Ming, y jouait avec Chiu Ta. La mise était la possession du lac. L'empereur ayant perdu, Chiu Ta acquit ce lac. Plus tard, Lou Chan Tchiao Ko écrivit ce poème:

Les affaires du monde sont comme le go, Dans lequel un seul coup adroit peut faire gagner un espace pour toujours.
Si un sentiment tendre ressemble au courant d'une rivière,
Quand donc diminuera la vitalité des Six Dynasties?

Sous Chen-tsong (règne Wan-li, 1573-1620) des Ming, les maîtres du go étaient nombreux. Selon le Yi-tchi (奕棋,Guide du go) de Wang Cheu-tchen (王世貞), les joueurs se répartissaient en trois écoles: celles de Yongkia (Wentcheou), d'Anhouei et de Tsingcheu.

Tchang Tchao établit une relation entre le go et la nature dans son ouvrage You meng ying (幽夢影, "Ombres d'un rêve calme''): «Au printemps, les jours de pluie sont réservés à la lecture. En été, c'est au go. En automne, ils sont à la rentrée des moissons; et en hiver, à la dégustation d'un vin.»

Le go est resté à la mode sous les Mandchous (ou Tsing, 1644-1912). Au XVIIe siècle, Kouo Paï-ling (過百齡), Cheng Ta-yeou (盛大有) et Wou Jouei­-tcheng (吳瑞澂) sont les grands maîtres. Sous Cheng-tsou (règne Kang-hi, 1662-1722), le titre suprême fut décerné à Houang Cheu-long (黃士龍) qui, à 18 ans, avait réussi la prouesse de battre sept fois de suite Cheng Ta-yeou, le grand maître. Comme les autres maîtres, Tcheou Tong-heou, Ho An-kong, Leou Tseu-heng et Sié Yeou-yu, ne furent pas ses adversaires, Houang Cheu-long reçut le titre de "maître des maîtres". Vers la fin de sa vie, il rencontra Siu Sing-yeou (徐星友), une étoile montante. Après dix parties consécutives, rapporte-t-on, la victoire était encore en suspens. Une relation de ces parties est toujours dispo­nible aujourd'hui dans le Siué lei pien (血淚篇 ,"Jeu de larmes et de sang"). Ce fut vraiment un match exténuant.

Joueurs de go sur le rouleau Un matin de printemps au palais Han, de Tcheou Ying (mort en 1552).
Puis Siu Sing-yeou domina la scène du go pendant trente années avant d'être battu à son tour par le jeune Tcheng Lan­-jou (程蘭如). Indigné d'avoir été ainsi battu, il décida dès lors de vivre en réclu­sion. Il écrivit le Kien Chan Tang Ki Pou (兼山堂棋譜), un manuel de go, le premier ouvrage traitant en détaille go avec force commentaires. Après lui, vinrent Léang Wei-kin (梁魏今), Fan Si-ping (范西屏) et Che Siang-hia (施襄夏), qui chacun à son tour se rendirent célèbres.

L'apogée du go fut atteinte sous Cheng-tsou (règne Kang-hi) et Kao­ tsong (règne Kien-long). Puis jusqu'à la République en 1912, il n'y eut plus de vé­ritables grands maîtres. Sous Te-tsong (règne Kouang-siu 光緒, 1875-1908), le Ki tsing hia kouan yi hiuan (寄青霞館奕選, série de quarante-cinq manuels de go) de Wang Tsouen-chan, donne la liste de quatre-vingt-trois grands maîtres anciens avec la description de plus de neuf cents parties.

Aux premiers jours de la République, Takabe Tohei, un joueur de go ja­ponais de cinquième dan (en chinois touan 段), vint en Chine. Mais il ne trouva personne qui pût le battre. Déçu, il s'exclama en soupirant: «Aujourd'hui, le meilleur joueur de go chinois atteint à peine le niveau du premier dan.»
Décidé à remettre à l'honneur le go en Chine, Honimbo Tosaku, grâce à ses sept visites à Pékin, fit connaître une nouvelle théorie japonaise du go. Il réus­sit tant et si bien qu'il contribua à la flo­raison de nouveaux maîtres de go chinois.

Aujourd'hui, le Japon jouit du pres­tige d'être le "royaume du go", avec l'é­tablissement d'une Académie de go, de règles de jeu précises et l'organisation de grands tournois. Cela rappelle l'entraîne­ment intensif des nouveaux maîtres, il y a trois siècles, sous les Tokugawa (德川).

Quand on parle de go en Chine con­temporaine, on ne peut pas ne pas penser à Wou Tsing-yuan (吳清源) ou à Lin Haï­-fong (林海峯). En 1928, le premier, à 15 ans, partit au Japon pour parfaire ses con­naissances. Peu de temps après, ses dons et ses efforts furent récompensés, battant aisément plusieurs adversaires japonais. On décrivit son style comme le "coursier céleste s'élançant sans hésitation dans les cieux". Il fut acclamé par le monde japo­nais du go comme un "génie extraordi­naire" et incomparable. Des tournois furent aussitôt organisés d'après les idées nouvelles de Wou Tsing-yuan, no­tamment sa règle du tié-mou (貼目) qui apporte des points compensatoires.
Une Partie de go, d'après un peintre des Song (960-1279).
Bien que maître de neuvième dan, Wou Tsing-yuan n'a jamais conquis les titres suprêmes japonais de meijin (名人) et de honimbo (本 因坊), mais cela n'a jamais affecté le respect que lui ont ac­cordé les milieux japonais du go. En août 1952, lorsque Wou Tsing­-yuan revint à Taïwan pour accepter le titre de "grand maître" de la République de Chine, Lin Haï-fong, âgé de dix ans, lui rendit visite. Les deux jouèrent une partie, et le jeune Lin Haï-fong, en six coups, montra ses dons exceptionnels, à l'étonnement général. Ce fut le tournant de sa vie.

Une année plus tôt, son père l'avait emmené voir le président de l'Associa­tion chinoise de go, M. Ying Tchang-tchi, avec l'espoir que ce dernier prendrait son fils sous son aile pour l'emmener au Japon. Lin Haï-fong était un "jade vierge" qui avait besoin d'être taillé et poli. Il fut donc envoyé au Japon où il fut pris en main par le maître Tchou Jen-yi, et dirigé afin d'en avoir une connaissance profonde du go et un sens moral complet.

A 23 ans, Lin Haï-fong osa défier Sakada Eihisa (坂田榮壽) tenant du titre de meijin et, à la surprise générale, il en remporta le titre. Trois ans plus tard, il conquit le titre de honimbo, et après ce triomphe, il gagna à nouveau les hon­neurs de meijin. Depuis on le connaît sous le nom d' Eul-mei-yao (二枚腰, l'homme aux deux ceintures), 

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